moi qui souhaitais rester neutre, je n’ai pas pu (petit pays) +1

Gaël Faye, Petit pays

Anna Valenn aime les +1ers romans

- Je ne suis ni hutu ni tutsi, ai-je répondu. Ce ne sont pas mes histoires. Vous êtes mes amis parce que je vous aime et pas parce que vous êtes de telle ou telle ethnie. Ça j'en ai rien à faire !

Alors qu'on se chamaillait, on entendait au loin, dans les collines, des tirs de blindés AMX-10. Avec le temps, j'avais appris à reconnaître leurs notes sur la portée musicale de la guerre qui nous entourait. Certains soirs, le bruit des armes se confondait avec le chant des oiseaux ou l'appel du muezzin, et il m'arrivait de trouver beau cet étrange univers sonore, oubliant complètement qui j'étais.


Petit Pays, Gaël Faye publié aux éditions Grasset, aussi en Livre de Poche -  Semi auto-biographique, le cauchemar du massacre hutu /tutsi, raconté à hauteur de gamin métis vivant dans une impasse cossue de Bujumbura. Un grand petit roman, par le sujet et le traitement, une écriture douce, de la vitalité, et ça sonne toujours juste.


Je lui confie seulement, un peu gêné, 
que ma soeur ne veut plus jamais 
entendre parler du Burundi.
Mamie en voulait à Maman de ne pas nous parler kinyarwanda, elle disait que cette langue nous permettait de garder notre identité malgré l'exil, sinon nous ne deviendrions jamais de bons Banyarwandas, "ceux qui viennent du Rwanda". Maman se fichait de ces arguments, pour elle nous étions des petits blancs, à la peau légèrement caramel, mais blancs quand même. S'il nous arrivait de dire quelques mots en kinyarwanda, aussitôt elle se moquait de notre accent. Au milieu de tout ça, je peux vous dire que je me foutais bien du Rwanda, sa royauté, ses vaches, ses monts, ses lunes, son lait, son miel et son hydromel pourri.