un jour ce sera vide

J'ai dix ans, Alain Souchon

Anna Valenn, Le Blog

Pourtant même pendant ces instants-là, je ne peux pas m'empêcher de me demander à quoi pensent Baptiste et sa mère. Parfois je tuerais pour savoir ce qui se passe dans la tête de Baptiste. Je le tuerais lui. Quand il ne parle pas, je ne sais plus où il est et je m'en veux d'être incapable de penser à autre chose, d'être vide à l'intérieur. Je suis comme une grosse méduse dont les filaments seraient tous tendus vers lui. Est-ce qu'il s'ennuie ? Est-ce qu'il a trouvé ça nul que je ne veuille pas escalader le mur qui va chez le voisin tout à l'heure ? Est-ce qu'il est fier que je sois le meilleur en sauce salade ? Et puis tout à coup il dit à sa mère un truc du genre : "Maman, j'ai pensé à cette symphonie de Beethoven que tu m'as fait écouter l'autre jour, en fait elle n'est pas triste, elle est mélancolique." Ca m'épate et je me dis qu'il doit y avoir énormément de paix dans son esprit pour y laisser germer de telles idées. J'imagine son espace mental comme une très grande maison aérée, avec plafonds de trois mètres de hauteur et parquet ciré, un piano à queue et de grandes fenêtres ouvertes sur un jardin luxuriant. Quelque chose de bien plus confortable que le taudis aux persiennes duquel j'observe le monde. 



Un jour ce sera vide, Hugo Lindenberg publié chez Christian Bourgois. C'est un premier roman, et il a obtenu prix du Livre Inter 2021 On est en Normandie. C'est les vacances d'été. Le narrateur a dix ans, il vit avec sa grand-mère juive et aimante, et une tante folle et poilue. Sur la plage, il rencontre Baptiste qui a un papa une maman une soeur, famille catholique aisée. Ils deviennent amis et un peu plus. Voilà voilà, c'est délicat, et par ci par là, un brin précieux.